Le lundi 7 avril 1986, la mère d'Annie Ernaux s'éteint dans une maison de retraite. En trois an, une maladie cérébrale, qui détruit la mémoire, l'avait menée à la déchéance physique et intellectuelle. Frappée de stupeur par cette mort que, malquré l'état de sa mère, elle s'était refusé à imaginer, Annie Ernaux s'efforce de retrouver les différents visages et la vie de celle qui était l'image meme de la force active et de l'ouverture au monde. Quete du sens de l'existence d'une femme, d'abord ouvrière, puis commerçante anxieuse de "tenir son rang", passionnée de lecture et pour qui s'élever "c'était d'abord apprendre". Mise à jour, aussi, de l'évolution et de l'ambivalence des sentiments d'une fille envers sa mère : amour et haine, culpabilité, tendresse et agacement, attachement viscéral et muet pour la vieille feme diminuée.
Dans la place, l'auteur évoquait son père. Les deux récits se recoupent, se complètent, mais l'éclairage change, ici plus charnel et contrasté. L'écriture, précise et concrète, ressuscite d'un' manière bouleversante cette mère qui était, pour sa fille, l'incarnation du Temps et la condition sociale d'origine : "j'ai perdu le dernier lien avec le monde dont je suis issue."